Etes-vous fait pour être un relais, un influenceur ou encore un « power networker » sur les réseaux sociaux ? Tout dépend du temps que vous êtes prêt à y consacrer et de ce que vous attendez de ces outils.
Tout individu peut, au cours de sa vie numérique, expérimenter quatre phases de maturité sur les réseaux sociaux. (4 profils d’internautes sur les réseaux sociaux )
1- Le présent
Tout d’abord le membre s’inscrit et remplit son profil. Il va alors passer un certain temps à ce stade, à découvrir la plateforme et ses membres, à lire des contenus, sans prendre la parole. A ce stade, il va avoir un nombre restreint de contacts, souvent des contacts forts. Ces internautes représentent 90% des profils inscrits sur les réseaux sociaux.
2- Le relais
L’internaute à l’aise avec sa présence sur le réseau va commencer à partager du contenu issu de sa veille. Cela part souvent d’une passion personnelle pour un domaine (par exemple, le collectionneur de vinyles). Le premier moteur est le partage de ce qui le fait vibrer. Le deuxième est la reconnaissance de ses pairs. Partager ainsi sa veille lui permet de se rendre visible sans prendre de risques, la responsabilité étant essentiellement endossée par l’auteur du post d’origine. Ces posts le rendant toutefois plus présent, il va observer une augmentation des demandes de contacts. Cela va nourrir encore davantage sa passion. Il va cependant arriver rapidement à un plafond en constatant un taux d’engagement assez faible concernant ses posts.
3- Le producteur-influenceur
Voulant dès lors aller plus loin dans le partage et la reconnaissance de son savoir, l’internaute va commencer à rédiger ses propres contenus. Il va aussi de plus en plus donner son avis. Cette étape est clé pour progressivement évoluer vers une prise de parole de plus en plus personnelle. En effet, plus ses propos seront singuliers et personnels, plus ils engageront son réseau qui multipliera les les commentaires et les partages d’informations. Mais le risque est qu’il soit aussi davantage critiqué. Il aura dès lors besoin d’un réseau de défenseurs actifs qu’il va progressivement se constituer. A ce stade, son réseau va largement se développer. Désormais se situant dans le top 1% des membres inscrits, il est reconnu comme influenceur. Cette compétence pourra faire de lui un meilleur professionnel. Ce processus de mise en avant de soi n’est pas anodin. Il est nécessaire que l’individu ait suffisamment confiance en lui et en ses idées pour les partager. La démarche doit aussi être authentique. A ce stade, la place de l’ego est souvent questionnée : qui suis-je pour me permettre d’écrire sur tel ou tel sujet ? Et surtout, est-ce que je m’y autorise sachant qu’au-delà de mon réseau, mon employeur peut aussi prendre connaissance de mes prises de position ?
4- Le power networker
Ayant compris les ressorts de l’engagement et ayant conquis une large audience, le membre va jouer de son influence pour en faire un véritable business. Il devient alors un professionnel du réseau. Il choisit ses sujets et son planning de publication par rapport à ses enjeux commerciaux. Il devient un social seller en puissance utilisant les techniques d’inbound marketing pour faire venir les opportunités à lui. Il doit accepter de livrer une part non négligeable de sa vie, même privée, ce qui favorise l’engagement émotionnel de son audience. Seul un très faible pourcentage d’internautes sur les réseaux sociaux parvient à ce stade mais il y a fort à parier qu’ils seront de plus en plus nombreux.
Les stades décrits ci-dessus peuvent être comparés à l’échelle de maturité de Stephen R. Covey (diplômé de Harvard et président du Covey Leadership Center, il a été le conseiller du Président Clinton). Pour lui, il y a trois niveaux de maturité : la dépendance, l’indépendance et l’interdépendance. Pour évoluer d’un stade à l’autre sur les réseaux sociaux, chaque individu va passer par ces trois grandes phases.
Quand intervient le passage d’un stade à l’autre ?
Il survient s’il y a changement de croyance ou de paradigme. La croyance, c’est la façon dont nous voyons, comprenons le monde. Une croyance est une affirmation que nous pensons être vraie, elle a une réalité psychologique mais pas nécessairement une réalité logique. Le changement de croyance intervient lorsque l’on est prêt à voir, entendre, interpréter un événement qui contredit notre croyance originel. Le problème est que, souvent, nous ne sommes pas conscients de certaines de nos croyances. Elles fonctionnent comme des postulats implicites à partir desquels nous agissons. Nous ne voyons, nous n’entendons que les éléments de notre environnement qui viennent confirmer nos paradigmes. Nous filtrons, déformons la réalité pour que notre vision du monde soit, et reste, cohérente, car nous ne sommes pas prêts à remettre en question notre structure de pensée, notre carte mentale. Il est important pour l’être humain d’avoir des croyances car c’est grâce à elles qu’il s’assure une sécurité psychologique, un équilibre. Il a besoin d’éléments connus, sur lesquels s’appuyer, et de maîtriser son environnement. Mais cela peut aussi le freiner. En interrogeant les personnes qui souhaitent changer de situation, toutes parlent d’un élément déclencheur, de quelque chose qui a été vécu, vu ou entendu et qui leur a permis de contredire l’une de leurs croyances. Cette évolution peut se faire naturellement, sans effort particulier, ou elle peut avoir besoin d’être accompagnée car elle est susceptible d’être déstabilisante.
L’environnement ne change pas, la perception que l’on en a, oui
Dès lors qu’il y a changement de croyance, l’individu est prêt à modifier son comportement, et donc à évoluer. Quand on se trouve au stade numéro 1, on se dit en général : « Etre présent sur les réseaux sociaux prend du temps », « Je n’en ai pas particulièrement besoin au regard de ma situation actuelle », « Mon réseau est déjà assez large et puis, de toutes façons, je n’aime pas réseauter », « D’ailleurs, ce n’est pas cela qui va me permettre de trouver un emploi », etc… Mais si l’individu en question raisonne plutôt de la manière suivante : « Il est fort probable que les réseaux sociaux me permettront d’acquérir plus de visibilité ou qu’ils m’aideront à concrétiser tel projet…», « Mon réseau est bien plus facile et rapide à solliciter via les réseaux sociaux » ou « J’ai certainement des choses à gagner en étant plus actif », dès lors il peut passer au stade numéro 2. Son environnement n’a pas changé mais la perception qu’il en a, a elle évolué : il voudra mieux utiliser ces outils, y consacrera plus de temps et assumera le fait de divulguer davantage d’informations sur lui et sur sa vision des choses.
Pour passer du stade 2 au stade 3, c’est à dire du statut de relais à celui de producteur-influenceur, il faut être prêt à assumer encore davantage ses opinions. Il faut pouvoir se dire : « Je gagne plus à m’exprimer qu’à rester dans l’ombre », « Mon image sera renforcée si je m’exprime », et combattre les croyances anciennes du type : « Si je me trompe ou si mon opinion n’est pas celle que l’on attend de moi, ou si l’on me juge négativement, mon image va en pâtir ».
Enfin, pour arriver au stade ultime de power networker, il faut encore franchir un autre cap. Il faut pouvoir s’extraire de certaines croyances limitantes du type : « Ma stabilité financière et familiale dépendent de mon emploi salarié », « Si je quitte ma situation actuelle, je prends un risque irréversible »… Les personnes qui réussissent ce passage pensent qu’elles sont le moteur de leur propre stabilité. Ce changement de croyance sera d’autant plus difficile que les croyances de l’entourage vont s’ajouter à ses propres croyances et résonner positivement ou négativement. C’est pourquoi il n’est pas aisé d’atteindre ce stade, cela demande un certain courage et dépend aussi beaucoup de la personnalité de chacun. Il n’est d’ailleurs pas nécessaire et utile pour tous de franchir toutes les étapes et d’arriver au stade ultime de power networker. Le profil que l’on va choisir sur les réseaux sociaux va avant tout dépendre de ressorts individuels, du but que l’on se fixe et des besoins qui en découlent.
Article rédigé par Benoit Martin et Marie Allexant
Publié sur Harvard Business Review France le 26/07/2018